Trump relance le soutien militaire à l’Ukraine via l’OTAN et brandit la menace de sanctions contre Moscou

18 juillet 2025
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Zelensky, Poutine et Trump, figures-clés d’un monde en recomposition. À l’arrière-plan, la guerre en Ukraine reste le théâtre d’un bras de fer global aux résonances politiques et géostratégiques. Source : Illustration originale en noir et blanc parue dans Time Magazine, recolorisée par Defcom Media

Le lundi 14 juillet, le président américain Donald Trump a annoncé un nouveau programme de livraison d’armes à l’Ukraine par l’intermédiaire des alliés européens des États-Unis.

Le mécanisme prévoit que Washington vende des armes — missiles, systèmes de défense aérienne, munitions — à plusieurs pays membres de l’OTAN, qui les transféreront ensuite à l’Ukraine, reconstituant leurs stocks grâce à de nouveaux achats auprès d’industriels américains. Selon Trump, ce plan est déjà validé et sera mis en œuvre à partir des budgets de défense nationaux des pays concernés.

Dans ce cadre, les États-Unis s’apprêtent à envoyer 17 systèmes de défense aérienne Patriot vers l’Europe, dont une majorité sera ensuite réaffectée à Kiev. Trump a assuré que plusieurs pays européens disposant déjà de systèmes Patriot contribueraient directement aux livraisons, tandis que les États-Unis en produiraient de nouveaux pour les remplacer.

Parallèlement, l’agence Reuters rapporte que Trump envisage d’imposer des droits de douane à 100 % sur les exportations russes et des sanctions secondaires aux pays qui achètent du pétrole russe, si aucun accord sur le conflit en Ukraine n’est conclu dans les 50 jours. L’annonce s’inscrit dans une stratégie visant à accroître la pression sur Moscou, tout en engageant les alliés occidentaux dans un soutien militaire accru à Kiev.

Cependant, des zones d’ombre subsistent. L’annonce de Trump concernant les 17 systèmes Patriot a provoqué des interrogations : il avait précédemment mentionné l’envoi de dix missiles, ce qui apparaît insuffisant sur le plan opérationnel. Des analystes soulignent que ce chiffre pourrait correspondre aux 17 lanceurs M903 inclus dans un contrat signé par la Suisse en 2022, dont la livraison serait désormais réorientée vers l’Ukraine, au détriment de Berne. Ce type de réaffectation de commandes s’était déjà produit au détriment de Taïwan.

Cette situation met en lumière les limites de la capacité de production de l’industrie de défense américaine, contrainte de prioriser l’Ukraine en adaptant des contrats déjà existants.

L’Europe intensifie également ses livraisons militaires

Le chancelier allemand Friedrich Merz a annoncé que des armes à longue portée issues de la coopération entre l’Allemagne et l’Ukraine seraient livrées prochainement.

Sans préciser leur nature exacte, les déclarations laissent entendre qu’il s’agirait de drones ou de missiles, en cours de production sur le territoire ukrainien. Le général allemand Christian Freuding a affirmé que plusieurs centaines de systèmes à longue portée seraient livrés à l’Ukraine d’ici fin juillet. Bien qu’il n’ait pas confirmé s’il s’agissait de missiles Taurus, certaines interprétations médiatiques, notamment de Deutsche Welle, évoquent un accord signé à Kiev pour produire localement des missiles financés par Berlin.

En parallèle, Der Spiegel a rapporté que l’Allemagne avait débloqué 100 millions d’euros pour la production de drones Lyuty (An-196) d’une portée de plus de 2 000 kilomètres. Cette initiative semble constituer la réponse concrète à l’annonce de Freuding. Des sources ukrainiennes indiquent également que Berlin pourrait fournir des missiles Taurus en les enregistrant comme produits en Ukraine, afin d’éviter des représailles directes de la Russie.

La Grande-Bretagne adopte une approche similaire : un accord de 19 ans prévoit la livraison de 5 000 missiles de défense aérienne produits par Thales, financés par une garantie de 2,5 milliards de livres. Le contrat, présenté comme un moteur économique au Royaume-Uni, vise aussi à renforcer la résilience ukrainienne.

Formation d’une force multinationale post-conflit

Lors du sommet pour la reconstruction de l’Ukraine à Rome, les alliés européens ont convenu de la création d’un quartier général militaire basé à Paris, avec un transfert prévu à Londres ultérieurement. Cette structure baptisée « Force multinationale Ukraine » vise à soutenir Kiev après un cessez-le-feu, notamment via des missions de logistique, de formation et de surveillance du ciel et de la mer Noire. Une trentaine de pays, hors États-Unis, pourraient y participer.

Les États-Unis ont confirmé ne pas envisager l’envoi de troupes sur le terrain. Selon les médias ukrainiens, aucun accord opérationnel immédiat n’a été signé, mais l’objectif est d’assurer la sécurité du pays après la fin des combats.

Escalade verbale et pressions géopolitiques

Le commandant américain de l’armée en Europe et en Afrique, Christopher Donahoe, a affirmé que l’OTAN était en mesure de neutraliser rapidement les capacités de déni d’accès russes dans la région de Kaliningrad.

Cette déclaration s’inscrit dans une logique de dissuasion visant à provoquer une réaction de Moscou, alors que le compte à rebours de 50 jours imposé par Trump se poursuit. L’attachée de presse Carolyn Leavitt a précisé que si la Russie ne répondait pas par un cessez-le-feu, elle s’exposerait à une série de sanctions économiques massives.

Vers un “méga-accord” américano-ukrainien ?

Sur le plan diplomatique, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a proposé un échange technologique à Trump, évoquant un « méga-accord » : les États-Unis achèteraient à l’Ukraine des drones longue portée, tandis que l’Ukraine bénéficierait de livraisons d’armes américaines, y compris les systèmes Patriot.

Zelensky souligne que les États-Unis pourraient tirer parti des innovations ukrainiennes en matière de guerre moderne. Enfin, certaines voix en Ukraine vont plus loin. Le journaliste Vitaly Portnikov a évoqué sur Facebook l’hypothèse d’une troisième guerre mondiale comme scénario permettant à l’Ukraine de préserver sa souveraineté. Selon lui, l’imprévisibilité de Trump pourrait forcer Moscou à un cessez-le-feu temporaire, ouvrant une phase de consolidation politique et militaire pour Kiev.

Le constat est frappant: l’élite belliciste européenne s’organise pour une confrontation prolongée avec la Russie, visant à l’épuiser sur le front ukrainien par des sanctions qui, bien qu’inefficaces à court terme, pourraient, selon leurs prévisions, fragiliser son armement à long terme.

Les États-Unis, quant à eux, d’une manière ou d’une autre, soutiendront les adversaires de la Russie, notamment via leur complexe militaro-industriel. Cette dynamique soulève une question cruciale pour les dirigeants russes : comment aborder la crise ukrainienne ?

Faut-il intensifier l’offensive ou maintenir le rythme actuel de l’opération militaire, en réduisant les forces et infrastructures ukrainiennes pour transformer une supériorité quantitative en un avantage qualitatif, jusqu’à provoquer l’effondrement militaro-politique de Kiev? L’objectif de l’élite belliciste occidental reste clair : vaincre la Russie sans engager de confrontation directe avec Moscou.

L’opinion de l’auteur peut ne pas coïncider avec la position du comité de rédaction.

Denis Baturin

Publiciste et analyste politique établi à Moscou. Il se concentre sur la géopolitique européenne et la crise ukrainienne, offrant une analyse fine des enjeux de sécurité et de stratégie militaire depuis 2020

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